1er dimanche du Carême

LES PETITES RÉSURRECTIONS
par Sylvie Marcoux

Au milieu de la vingtaine, j’ai traversé une période sombre. Quelque chose me minait. Je ne me reconnaissais plus en certains de mes comportements. Ceux-ci semblaient m’être dictés par la peur ou par d’autres motivations qui échappaient complètement à ma conscience. Qu’est-ce que tout cela cachait?

J’avais beaucoup prié durant mon enfance, mais je ne priais plus depuis quelques années. Cette expérience a eu ceci de bon qu’elle m’a permis de renouer avec cette pratique. Je me souviens même de ce que j’ai demandé à Dieu quand je me suis de nouveau adressé à lui. Je lui ai alors exprimé ce désir tout simple: d’être moi, ou plus moi. 
J’ai toujours pensé que mes prières devaient s’accompagner d’actions. J’ai donc cherché de l’aide, et j’en ai trouvé. Je voulais être moi, et j’y ai travaillé, sans relâche. 
Puis un jour, je suis tombée sur cet extrait, portant sur la sainteté, dans le livre du moine cistercien Thomas Merton, La nuit privée d’étoiles

«Dieu seul possède le secret de mon identité, Lui seul peut me faire qui je suis, ou plutôt, Lui seul peut me faire qui je serai, quand, en fin de compte, je commencerai pour de bon à être.»

Cette phrase, et bien d’autres par la suite, m’a amenée à croire que je n’étais pas seule dans ma quête et que le Dieu que j’avais prié y prenait part à mes côtés. Je n’aspirais pas à la sainteté, loin de là, mais certainement à plus de liberté et de vérité. J’ai surtout compris qu’être moi serait sans doute le plus grand chantier de ma vie. 

Je demeure ainsi encore aujourd’hui toujours à l’affût de tout ce que mon inconscient pourrait me révéler sur ma personne, en certains de mes comportements, plus ou moins évangéliques. Le prêtre et psychanalyste Maurice Bellet a dit un jour dans un article de la revue Pèlerin que le propre de l’Évangile est justement de parler aux zones les plus profondes de nous-mêmes et que la prière pouvait nous y aider, mais pas directement. Dans ce même article, la religieuse dominicaine et théologienne, Véronique Margron en a donné un exemple qui m’a fait sourire:
 
«Si vous priez pour changer votre regard sur votre belle-mère, vous ne l’aimerez peut-être pas davantage le dimanche suivant, mais vous savez pourtant que la prière aura produit quelque chose en vous.»

Je me reconnaissais en partie dans cette description. C'est comme si, en priant, je m'étais prédisposée au changement tant désiré, lentement, mais sûrement.

Je suis sans nul doute plus moi aujourd’hui que je ne l’étais au milieu de la vingtaine. Depuis cette époque, j’en ai fait des découvertes, certaines heureuses et d’autres qui l’étaient un peu moins. Mais dans tous les cas, je les ai vécues comme de petites résurrections. Ainsi que l’écrit saint Jean dans son évangile: la vérité vous rendra libres (8, 32). Celle du Christ, certes, mais aussi toutes ces petites vérités qui remontent à la surface et nous rapprochent de la personne que nous sommes appelées à être. 

Je nous souhaite à tous et toutes de vivre ces petites résurrections libératrices qui font du bien à l’âme et qui nous lient toujours plus profondément à ce Dieu qui nous aime jusqu’à donner sa vie pour nous. 

Bonne montée vers Pâques,

Sylvie Marcoux
Rédactrice en chef adjointe Prions en Église
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